Les inégalités dans le monde à travers la « géopolitique des visas »

« Que peut-on comprendre de la structure du monde, à partir des politiques des visas ? Des inégalités flagrantes : les titulaires d’un passeport de certains pays sont accueillis presque partout, tandis que d’autres nationalités sont empêchées de circuler. Des relations entre États qui ne sont pas symétriques : ainsi le détenteur d’un passeport sri-lankais est-il accepté sans visa au Lesotho, tandis qu’un résident de ce pays devra obtenir un visa à l’arrivée s’il se rend au Sri Lanka. »

Philippe Rivière, Voyager sans visa, Visionscarto.net, février 2016

Le cartographe Philippe Rivière présente ici, dans un court article passionnant, plusieurs cartes du monde en fonction de la « géopolitique des visas».

Il évoque d’abord une carte utopique représentant un monde sans frontière, où tous les habitants du monde seraient libres de se déplacer sans contrainte, et cite un extrait d’un très beau texte de Stefan Sweig écrit en 1942, Souvenirs d’un Européen, et dont on peut retrouver l’intégralité ici.

« Avant 1914, la terre avait appartenu à tous les hommes. Chacun allait où il voulait et y demeurait aussi longtemps qu’il lui plaisait. Il n’y avait point de permissions, point d’autori­sations, et je m’amuse toujours de l’étonnement des jeunes, quand je leur raconte qu’avant 1914 je voya­geais en Inde et en Amérique sans posséder de passe­port, sans même en avoir jamais vu un. »

Le cartographe Philippe Rivière montre ensuite à travers plusieurs cartes du monde d’aujourd’hui les très fortes inégalités de mobilité à l’échelle mondiale vues à travers la géopolitique des visas.

Il mentionne le site Passeport Index, qui classe tous les ans les passeports du plus « fort » au plus « faible » selon la possibilité qu’ils offrent de se déplacer dans le monde sans avoir à demander de visa. Dans le classement 2017, on apprend que le passeport le plus « fort » est le passeport allemand : il permet voyager dans 158 pays sans avoir à y demander un visa. A l’extrême inverse, le passeport le plus «faible» est celui de l’Afghanistan, qui ne permet à ses détenteurs de voyager sans visa que dans 23 pays.

A compléter, toujours sur l’excellent visioncarto.net, avec deux autres cartes sur le même thème : « Pour Schengen, un monde bienvenu et un monde « d’indésirables« , une carte de Philippe Rekacewicz de janvier 2016, qui montre de façon frappante l’inégalité dans l’accès à l’espace Schengen depuis le monde entier.

Schengen Philippe Rivière et Philippe Rekacewicz
« Pour Schengen, un monde bienvenu et un monde d’indésirables » – Carte de Philippe Rekacewicz, 2016

 

Et un autre exemple à travers le cas de la Suisse : Politique des visas : comment la Suisse partage le monde et Les citoyens suisses avec et sans visa, également par Philippe Rekacewicz en janvier 2016.