Paysages culturels et Systèmes Ingénieux du Patrimoine Agricole Mondial (SIPAM)

La FAO reconnaît aujourd’hui 72 agro-systèmes comme faisant partie d’un patrimoine agricole mondial : les « Systèmes Ingénieux du Patrimoine Agricole Mondial » (SIPAM).  Ils sont identifiés comme représentant « non seulement des paysages naturels inouïs, mais également des pratiques agricoles qui génèrent des moyens de subsistance dans les zones rurales tout en combinant de manière unique la biodiversité, des écosystèmes résilients, traditions et innovations. »

Ces « Systèmes Ingénieux du Patrimoine Agricole Mondial (SIPAM) » sont désignés en anglais sous le sigle GIAHS : « Globally Important Agricultural Heritage Systems ».

Une liste à rapprocher du patrimoine mondial de l’UNESCO, en particulier de ses paysages culturels.

Un exemple de SIPAM : L’agriculture andine, SIPAM depuis 2011

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L’agriculture andine est le fruit de l’adaptation des agriculteurs à leur environnement depuis plus de 5000 ans. Les principales expressions des connaissances agricoles autochtones s’observent par la présence de terrasses, de terrains en crêtes, de systèmes d’irrigation locaux, d’outils agricoles traditionnels, de différentes cultures endémiques et du bétail élevé à différentes altitudes.

La sélection génétique de ces agriculteurs a conduit à la domestication d’un grand nombre d’espèces endémiques telles que la pomme de terre et le quinoa. De plus, l’agriculture andine comprend trois principaux systèmes agricoles: les zones de production de maïs (2800 à 3300 m), les zones de production de pommes de terre (3,300-3800 m.) et la zone d’élevage avec des cultures de haute altitude telles que quinua, cañihua (3,800-4500 m.). À chaque altitude les meilleures cultures ont été domestiquées.

Enfin, les communautés autochtones démontrent une organisation sociale forte avec leurs propres normes et rituels culturels comme l’hommage à la Pachamama (la terre mère) conduisant à des pratiques durables, mais aussi à la solidarité. En effet, l’enrichissement de l’identité est probablement l’un des principaux objectifs atteint grâce à l’agriculture.

Ces zones regroupent la plupart des anciennes techniques agricoles traditionnelles. Cependant, de réels défis dont la pression des jeunes partant en forêt ou dans les villes en espérant trouver une autre vie mènent à une perte sévère des connaissances et de la biodiversité.

Un exemple de paysage culturel classé au patrimoine mondial de l’UNESCO : Les rizières en terrasses des cordillères des Philippines

Décrites ici par le géographe Yves Boquet, dans un article publié en 2017  : « Muyong et subak. Production agricole, patrimoine culturel et enjeux environnementaux dans les rizières en terrasses de Bali (Indonésie) et du pays Ifugao de Luçon (Philippines) » (Bulletin de l’Association des Géographes Français).

Les rizières de Batad, Philippines @Yves Boquet 2011

Photo : Les rizières de Batad (Philippines), @ Yves Boquet, 2011

« Les rizières en terrasses de Bali et du Nord des Philippines ne sont pas seulement des sites spectaculaires de production agricole dans des contrées collinaires ou montagneuses. Leur développement par les Balinais hindouistes et les Ifugao non christianisés comprend une forte dimension religieuse en même temps qu’une complexe organisation sociale autour de la gestion des ressources en eau et des forêts. L’essor récent du tourisme, couplé à la patrimonialisation, d’origine externe, de ces espaces agricoles conduit aujourd’hui à plusieurs défis pouvant remettre en cause l’équilibre de ces sociétés : surfréquentation touristique, perte d’authenticité, abandon de la terre par les jeunes. Ces agricultures locales délicates sont-elles durables dans le contexte de la mondialisation ? Quels arrangements peuvent permettre leur survie ? »